Guy MARTINET, Président du SE ACE
Préambule
Les accords nationaux interprofessionnels (ANI) se succèdent à un rythme soutenu, preuve à la fois de la vitalité du dialogue social (cet exercice de démocratie sociale qui met en lice les entreprises et leurs salariés – par l’intermédiaire des organisations d’employeurs et des syndicats qui les représentent respectivement – ainsi que l’Etat et dont le SE ACE a déjà eu l’occasion d’exposer le sens et la portée1) et de l’urgence des thèmes que l’actualité impose de traiter.
Qu’on y songe :
2020 : ANI du 26 novembre relatif à la mise en œuvre réussie du télétravail2 et ANI 9 décembre pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail ;
2021 : ANI du 13 juillet relatif à la mise en œuvre du télétravail dans la fonction publique ;
2022 : ANI du 14 avril pour un paritarisme ambitieux et adapté aux enjeux d’un monde du travail en profonde mutation3
2023 : ANI du 10 février relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise4 , ANI du 11 avril relatif à la transition écologique et au dialogue social – qui fait l’objet du présent article -, et ANI du15 mai intitulé
Branche AT/MP : un consensus social réaffirmé par une prévention ambitieuse, une réparation améliorée et une gouvernance paritaire renforcée.
La Commission sociale de l’ACE ou le SE ACE ont tenu à rendre compte de la plupart de ces derniers accords pour deux raisons, que les lecteurs de la présente revue connaissent :
- non seulement les ANI permettent aux partenaires
sociaux de se saisir de sujets d’actualité susceptibles d’impacter les relations dans le monde du travail afin de négocier les garanties sociales qu’exige
leur mise en pratique au sein de l’entreprise (ainsi
du télétravail ou du partage de la valeur), - mais ils ont une valeur normative dès lors qu’ils sont étendus ou qu’ils contiennent des recommandations conçues pour servir d’orientation à de nouvelles lois ou à y être transposées (citons, par exemple, la loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail et, au moment où ces lignes sont écrites, l’adoption en première lecture par l’Assemblée nationale, le 29 juin 2023, du projet de loi sur le partage de la valeur).
Ce dynamisme est aussi la conséquence de l’accord susmentionné de 2022 sur le paritarisme, lequel a eu pour effet d’instaurer un dialogue social continu qui s’est traduit par la mise en place d’un agenda économique et social paritaire autonome (voir note 3) destiné à débattre et convenir chaque année, en dehors de la tutelle de l’état, des thèmes de négociation et des chantiers à conduire.
La négociation en vue de la conclusion de cet ANI s’est achevée le 11 avril 2023.
Cette négociation, qui a été engagée en juillet 2022, s’est déroulée de manière concomitante avec l’élaboration du plan gouvernemental de sobriété énergétique et s’inscrit dans le prolongement de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets5.
Il a recueilli la signature de trois organisations professionnelles d’employeurs : l’U2P, le MEDEF, la CPME, et de deux organisations syndicales de salariés : la CFDT et la CFTC.
Cet ANI, qui comporte un préambule et se divise en cinq chapitres, présente une structuration originale résultant de la volonté qui a été celle des partenaires sociaux de ne pas se focaliser sur un simple état des lieux mais de promouvoir au travers du dialogue social (en entreprise, dans les commissions paritaires et dans les branches professionnelles), la recherche des pistes de discussion visant à appréhender les défis posés par la transition écologique et à y répondre (particulièrement dans les TPE et les PME).
Ce souci de déboucher sur un document plus opérationnel que juridique a ainsi conduit les négociateurs à structurer les cinq chapitres de l’ANI en repères juridiques (présentation des outils «permettant d’encadrer et d’organiser le dialogue social») associés à des repères pratiques (présentation d’exemples et de bonnes pratiques «pour nourrir et approfondir le dialogue social») qui constituent une somme d’illustrations et de pistes proposées à la réflexion des acteurs du dialogue social .
En revanche, cet ANI n’impose pas de nouvelles obligations et n’appelle pas de changement normatif.
Enfin, l’ANI est complété par 4 annexes destinés à faire le point sur :
- les organismes et outils à l’appui de la GPEC ;
- les organismes, agences facilitatrices et autres
ressources (guides, brochures, etc.) pouvant être
mobilisés en matière de transition écologique ; - les textes réglementaires supplétifs relatifs aux
informations devant être mises par l’employeur à
disposition du CSE dans la BDESE ; - les principales obligations environnementales des
entreprises.
Il est conclu pour une durée indéterminée et soumet le suivi de sa mise en œuvre à un comité de suivi paritaire composé des organisations de salariés et d’employeurs signataires, dont la première réunion devra avoir lieu au pus tard le 11 avril 2025, puis chaque année. En outre, les organisations signataires ont programmé de se réunir avant le 31 décembre 2023 afin d’identifier les éléments à suivre.
Le préambule de l’ANI relatif à la transition écologique et au dialogue social
Les partenaires sociaux ont introduit leur ANI par un triptyque dont le premier volet énonce de manière générale les enjeux majeurs d’une transition écologique juste et les défis économiques et sociaux en découlant.
Dans un deuxième volet, ils se sont attachés à mettre en avant à la fois le rôle des entreprises, de leurs salariés et des représentants de ces derniers, qui est d’être des acteurs de cette transition et dont l’implication est déterminante, et l’opportunité que celle-ci représente pour eux, sans sous-estimer pour autant les contraintes et incertitudes inhérentes à tout processus de transformation.
Prolongeant leur approche, ils ont entendu faire mention des moyens ou actions à engager ainsi que des dispositifs ou démarches à activer par les entreprises pour intégrer les questions environnementales dans leur organisation, leur gestion et leur stratégie globale.
Enfin, le préambule souligne, dans un troisième volet, la place non seulement du dialogue social
- aux niveaux entreprise, territorial ou sectoriel –
«dans l’anticipation, l’appropriation, l’acceptabilité et l’accélération de la transition écologique» ainsi qu’en vue de l’élaboration d’«une vision globale des enjeux à la fois économiques, sociaux et environnementaux» mais aussi d’un dialogue plus large, dit dialogue professionnel, notamment dans les plus petites structures (sur cette nouvelle notion, voir Chapitre 2 ci-dessous).
Ce volet se conclut par la référence aux outils juridiques dont l’existence permet d’organiser ce dialogue et que l’ANI se propose de passer en revue afin de susciter et soutenir les efforts de prise en compte de la dimension environnementale du dialogue social ou professionnel par les entreprises et les branches professionnelles.
L’U2P7 avait, pour sa part, entendu faire valoir la nécessité d’adapter le sujet aux petites entreprises, dont les structures ne sont d’une manière générale pas appropriées au dialogue social : ce souci d’adaptation des modalités du dialogue social/professionnel environnemental à la situation de chaque entreprise a été entendu est effectivement confirmé tout au long du préambule comme de l’ANI proprement dit.
Premier chapitre : identifier des leviers de changements dans le cadre d’un dialogue social éclairé sur la transition écologique
L’objectif est ici d’«identifier ce qui peut avoir un impact significatif sur une entreprise et ses parties prenantes, compte tenu des répercussions de ses activités sur l’environnement».
L’ANI recommande à cet effet de procéder en trois phases (pouvant du reste être matérialisées par la conclusion d’un accord) : en dressant d’abord un bilan de la situation de l’entreprise, du groupe, de la branche professionnelles, puis en hiérarchisant les priorités, afin de pouvoir ensuite articuler de manière progressive et cohérente les actions et chantiers devant conduire à adopter une démarche environnementale globale et progressive.
Les repères pratiques de cette partie comportent des suggestions d’actions par domaines, visant :
- au titre des ressources humaines : à organiser le dialogue social, les conditions de travail et la politique de gestion des ressources humaines ;
- au titre de la production : à sensibiliser la recherche et le développement, à s’impliquer dans des actions collectives externes ; à s’orienter vers une politique de sobriété et d’efficacité énergétique adossée à une stratégie d’économie, d’optimisation des process et moyens, de réduction de la dépendance aux matières carbonées ; à favoriser les achats responsables et les mobilités durables ; à intégrer les risques liés aux changements environnementaux dans l’élaboration des plans de continuité d’activité ;
- au titre de l’engagement environnemental : à s’inscrire dans différents types de dispositifs (mécénat, volontariat, partenariats etc.) ;
- au titre de la gouvernance environnementale et extra-financière : à promouvoir la vision environnementale au sein des instances de gouvernance ou de direction ou dans les statuts (raison d’être, entreprise à mission).
L’ANI invite en outre les entreprises à se référer à la délibération commune des partenaires sociaux sur «La RSE dans les TPE-PME» du 21 décembre 2017 ou bien à faire appel aux commissions paritaires régionales (CPR) ou encore à s’adresser à l’Agence de la transition écologique (ADEME).
Deuxième chapitre : permettre au dialogue social et au dialogue professionnel de traiter des enjeux environnementaux au niveau de l’entreprise
Après avoir rappelé les compétences du CSE (comité social et économique), telles qu’elles ont été élargies par la loi climat et résilience du 21 août 2021 précitée, ce chapitre inventorie – dans une partie 2.1. – les mécanismes juridiques du dialogue social dont dispose le CSE et pouvant être mobilisés en matière environnementale (au besoin en éclairant leur mise en œuvre pratique dans cette perspective), qu’il s’agisse :
- de son information-consultation dans le cadre de ses consultations ponctuelles ou récurrentes,
- des outils accessibles pour évaluer les conséquences environnementales des décisions qui lui sont soumises (les repères pratiques citent ici, notamment : l’analyse environnementale décrite dans la norme 14001, l’audit énergétique, le bilan des émissions de gaz à effet de serre – BEGES -l’étude d’impact prévue par l’article L. 122-1, III du code de l’environnement…),
- de l’exercice du droit d’alerte et des attributions particulières du CSE dans les établissements comprenant une installation classée,
- de l’utilisation de la BDESE (base de données économiques sociales et – depuis la loi précitée -environnementales),
- de la formation des représentants des salariés,
- de l’usage des heures de délégation,
- du recours aux experts,
- de la mise en action de la CSSCT (commission santé, sécurité et condition de travail du CSE) ou des représentants de proximité quand ces institutions sont en place,
- de l’apport des activités sociales et culturelles du CSE,
- ou enfin du rôle que les représentants des salariés peuvent être amenés à jouer au niveau des conseils d’administration ou de surveillance.
La partie 2.2. appelle une attention particulière.
Intitulée «Le dialogue professionnel et le droit d’expression directe des salariés dans la mise en œuvre de la transition écologique», cette partie concerne les entreprise petites et moyennes dépourvues d’instances de représentation du personnel ou de délégués syndicaux.
Dans ces entreprises, un dialogue dit «professionnel» peut s’établir entre l’employeur et les salariés de manière à les «impliquer plus directement sur les questions opérationnelles de l’organisation du travail et des activités de l’entreprise».
«Ainsi, le dialogue professionnel désigne toute forme de communication et de partage direct d’informations relatives à la vie de l’entreprise, à son organisation et à la réalisation du travail» ; et d’ajouter opportunément que celui-ci «peut constituer un vecteur de la transition écologique de l’entreprise dès lors qu’il permet d’engager une réflexion sur les transformations dans l’organisation des activités de l’entreprise».
Les partenaires sociaux ont de la sorte substitué cette notion de dialogue professionnel à celle, plus couramment dénommée depuis plusieurs années «dialogue social informel», en vue de servir le plus largement possible de «vecteur» à l’appréhension par toutes les entreprises des questions environnementales.
En outre, l’ANI rappelle que les salariés bénéficient, depuis la première loi Auroux n° 82-689 du 4 août 1982 relative aux libertés des travailleurs, d’un droit d’expression directe et collective portant sur le contenu, les conditions d’exercice et l’organisation du travail, lequel peut ainsi fournir le support à des échanges sur des sujets liés à la transition écologique (tels que la gestion des périodes de canicule, la réduction des déchets, des consommations énergétiques ou des émissions de carbone liées à la mobilité etc.).
Troisième chapitre : intégrer les enjeux environnementaux dansles négociations collectives
Les négociations collectives (soit dans l’enceinte de l’entreprise, de l’établissement ou du groupe, soit au niveau interentreprise, soit au sein des branches professionnelles ou au niveau interprofessionnel) constituent un cadre pertinent pour traiter des actions allant dans le sens de la transition écologique, d’autant que les thèmes des négociations périodiques prévus par le code du travail peuvent être aménagés par accord collectif et donc orientés vers les questions environnementales.
Ainsi est évoquée la possibilité :
- au niveau de l’entreprise, de négocier un agenda
social et un accord pour organiser et hiérarchises
les chantiers de mise en œuvre de la transition
écologique ; - au niveau des branches, de négocier (i) des accords
d’adaptation de l’organisation et des conditions
de travail, (ii) des accords de méthode organisant
et hiérarchisant les chantiers de la transition écologique, (iii) des accords d’intéressement comportant des critères de RSE.
L’ANI s’est plus particulièrement intéressé aux négociations en entreprises et aux acteurs de celles-ci.
Sur ce terrain, il a déjà été fait mention dans de précédents articles de l’apport réformateur de la loi n° 2015-994 du 17 août 2015 relative au dialogue social (loi Rebsamen), laquelle a créé trois blocs de négociation annuelle obligatoire, dont l’un regroupe les deux thèmes (i) de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et (ii) de la qualité de vie et des conditions de travail.
L’article L. 2242-17 du code du travail qui est consacré à ce bloc de négociation a été précisément complété par la loi d’orientation des mobilités n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 (loi LOM).
Cette dernière lui a en effet adjoint un huitième thème ayant pour finalité de positionner l’amélioration de la mobilité des salariés entre leur lieu de résidence habituelle et leur lieu de travail au cœur du dialogue social (en tout cas dans les entreprises dont au moins cinquante salariés sont employés sur un même site).
C’est ainsi que les négociateurs de l’ANI invitent les entreprises et leurs salariés ou leurs représentants ainsi que les branches à réglementer par accords l’usage de modes de transports vertueux de même que les modalités de prise en charge par l’employeur des frais d’alimentation d’un véhicule électrique, hybride ou à hydrogène ou des frais liés à l’usage du covoiturage, d’un vélo ou d’un vélo à assistance électrique, comme prévu désormais par l’article L. 3261-3-1 du code du travail qui instaure à cet effet le dispositif de «forfait mobilités durables».
Dans le prolongement de ces considérations, l’ANI préconise :
- d’envisager des adaptations de l’organisation du travail (par accord sur le télétravail ou sur le temps de travail ou par la mise en place d’un plan de mobilité – pour l’élaboration duquel un certain nombre de suggestions sont énoncées -) ;
- d’insérer des critères environnementaux dans la politique de rémunération (notamment dans les accords d’intéressement selon les modalités exposées à l’article 15 de l’ANI du 10 février 2023 relatif au partage de la valeur au sein de l’entreprise précité – voir note 4 ci-avant -) ;
- d’orienter les placements des fonds d’épargne salariale vers des investissements socialement responsables (ISR).
Quatrième chapitre : traiter les enjeux environnementaux dans les espaces de dialogue social territoriaux et sectoriels
Les partenaires sociaux ont entendu se préoccuper, au travers du présent chapitre, du cas des TPE, parce qu’elles n’ont pas toujours la faculté ou les moyens d’aborder par elles-mêmes les questions d’ordre environnemental, ainsi que plus largement (mais dans le même esprit) celui des entreprises qui peuvent se heurter à des situations de compétitivité défavorable par rapport à des concurrents moins avancés lorsqu’elles s’engagent sur le terrain de la transition écologique.
L’ANI explore donc les possibilités d’information, d’anticipation et de proposition, enfin d’accompagnement qu’offrent :
- les commissions paritaires permanentes de négociation et d’interprétation (CPPNI), qui sont depuis la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours (loi travail) les organes par excellence du dialogue social dans les branches professionnelles (article L. 2232-9 du code du travail),
- ainsi que les commission paritaires régionales (CPR) au niveau interprofessionnel (CPRI dont l’origine remonte à la loi Rebsamen du 17 août 2015 relative au dialogue social précitée), dans les secteurs de l’artisanat (CPRIA) ou des professions libérales (CPRPL).
Sous la rubrique des repères pratiques, l’ANI retient les exemples suivants de mise en œuvre de la transition écologique par les CPR :
- aider les entreprises à identifier les leviers de transformations et les aides financières à disposition, créer les outils pertinents, etc. ;
- jouer un rôle d’anticipation dans la transition écologique en menant des travaux prospectifs et de diagnostics en lien avec les branches ;
- articuler les enjeux de la transition écologique avec les difficultés déjà identifiées sur le terrain ; par exemple, l’attractivité des métiers pour accélérer la transition écologique (rénovation thermique, traitement des déchets, transports, maintenance, etc.) ;
- mettre en synergie les acteurs et les orienter vers les outils, ressources et accompagnements pertinents à disposition ;
- faire des propositions en matière d’activités sociales et culturelles qui intègrent des préoccupations environnementales (achats responsables, alimentation durable etc.).
Cinquième chapitre : saisir les opportunités liées aux enjeux relatifs aux emplois et compétences dans la mise en œuvre de la transition écologique
Les négociateurs de l’ANI ont introduit leur propos en ces termes :
«Atténuer l’impact environnemental des entreprises et réduire leur vulnérabilité face aux enjeux environnementaux implique l’anticipation des mutations, l’adaptation et l’évolution des métiers, des compétences, des connaissances et des qualifications des salariés, en parallèle de la transformation des procédés et des changements de technologie».
Sur ce fondement l’ANI dégage, outre les modes d’information et de consultation du CSE évoqués précédemment, deux autres outils :
- les négociations collectives relatives à la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) aux niveaux de l’entreprise et de la branche (point qui est brièvement examiné ci-après),
- les organismes régionaux en charge des études prospectives liées à l’emploi.
Le code du travail fait obligation aux branches professionnelles (article L. 2241-12 du code du travail) et aux entreprises d’une certaine taille (article L. 2242-20 du code du travail), de négocier tous les trois ans (à défaut d’accord prévoyant une autre périodicité) :
- sur «la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences» (branches),
- sur «la gestion des emplois et des parcours professionnels et sur la mixité des métiers» – ou GEPPMM
pour les amateurs de sigles – (entreprises).
Ainsi que le précise en effet l’ANI, «la mission des branches professionnelles consiste à créer les conditions pour accompagner et favoriser la mise en œuvre de la démarche GPEC au sein des entreprises et principalement des TPE/PME».
Or la loi climat et résilience n° 2021-1104 du 22 août 2021 précitée est venue justement compléter les articles susmentionnés pour assigner à ces négociations – et plus spécifiquement aux accords de GPEC auxquels celles-ci pourraient aboutir dans les entreprises -, en sus des buts préexistants, celui de «répondre aux enjeux de la transition écologique».
Les partenaires sociaux se sont donc appuyés sur ces textes pour élaborer, au titre des repères pratiques, des stratégies de GPEC à l’intention, d’une part, des banches, y compris au niveau des territoires ou en lien avec les CPNEFP/CPNEF/CPNE (commissions paritaires nationales emploi et formation), avec le soutien des observatoires de branche et les OPCO (opérateurs de compétence), et, d’autre part, des entreprises.
Si le cheminement est long depuis l’accord de Paris de 2015 (voire depuis les premiers rapports du GIEC qui remontent aux années 1990), la prise de conscience concrète du caractère crucial et désormais urgent de la transition écologique est récente mais réelle.
En témoignent en France :
- la Convention citoyenne pour le climat (constituée après l’échec de la mise en place d’une fiscalité carbone), qui a déposé son rapport en juin 2020,
- et en tout dernier lieu le rapport Pisani-Ferry remis en mai 2023 pour répondre à la mission impartie à son auteur par la première ministre – soucieuse de mettre les décisions en cohérence avec leurs incidences financières eu égard à la diversité des mécanismes en jeu -, à savoir : de réunir les éléments, notamment par voie de modélisation, «permettant de nourrir l’évaluation macroéconomique de la nouvelle stratégie française sur l’énergie et le climat […] et plus généralement les arbitrages nécessaires à sa finalisation».
On notera que cet important rapport se conclut par un chapitre consacré à l’Europe, lequel a pour mérite d’élargir la réflexion et où l’on peut lire sous le paragraphe intitulé «L’Europe à la croisée des chemins» : «L’Union européenne ne peut être à la fois championne du climat, championne du multilatéralisme et championne de la vertu budgétaire»…
Tant il est vrai que la transition écologique est autant une question de coût (en raison des mutations technologiques exigées, c’est-à-dire des efforts à consentir et des investissements à engager pour y parvenir) que d’option politique, en termes de compétitivité et d’attractivité (à tous les niveaux : régional et sectoriel, européen et mondial) et finalement de volonté.
C’est pourquoi, le dialogue social (dont le SE ACE tient à rappeler qu’il a vocation à être l’un des acteurs engagés au sein de la branche des avocats8 ) se devait de se saisir de ce sujet. En adoptant cet accord national interprofessionnel après la loi sur les mobilités de décembre 2019 et la loi climat et résilience d’août 2021, les partenaires sociaux ont entendu prendre le relais pour mettre le monde du travail en état de se doter des instruments adéquats et les entreprises de s’adapter, chacune à son niveau et dans le contexte de leurs activités respectives.
Avec une ambition : faire en sorte qu’employeurs et salariés (de même que leurs représentants) puissent ensemble s’accorder pour convertir des nécessités en opportunités.
- Voir à ce sujet, notamment, revue ACE n° 155/janvier 2022.
- Voir revue ACE n° 153/mai 2021.
- Voir revue ACE n° 158/janvier 2023.
- Voir revue ACE n° 159/juin 2023.
- Cette loi a été évoquée dans un article de la Commission sociale de l’ACE intitulé L’environnement est-il un objet de droit du travail, paru dans le n° 158/janvier 2023 de
la revue de l’ACE – consacré, notamment, à l’environnement – et dont le présent article constitue ainsi un prolongement. - Le travail de compilation et de créativité qui a permis de rassembler ces repères pratiques mérite d’être signalé. Sauf exception, ils ne seront cependant pas détaillés dans
la présente note car cela reviendrait à paraphraser l’ANI. En revanche, les lecteurs qui souhaitent en savoir plus sont évidemment invités à se reporter au texte de celui-ci. - Rappelons que l’U2P compte parmi ses membres l’UNAPL, à laquelle adhère l’ACE.
- Pourvu qu’il soit représentatif, condition qui se mesure, notamment, au nombre de ses adhérents, étant ici précisé que le prochain cycle de mesure (qui aura lieu en
2025) prendra en compte le nombre des adhérents que comptera le SE ACE au 31 décembre 2023 (voir l’article «Adhérer au SE ACE !» in revue ACE n° 155/janvier 2022)