La revue de l’ACE n°158 – Les dessous de L214

Par Jamil Abou Assi, Co-auteur de Ecoterrorisme (Tallandier, 2016)

L’association L.214 de défense des droits des animaux défraye la chronique depuis plusieurs années grâce à ses actions de communication visant à sensibiliser l’opinion publique sur la souffrance animale.

Elle s’est notamment rendue célèbre par ses vidéos « choc » réalisées clandestinement dans divers élevages ou abattoirs, montrant poules et poulets entassés dans des cages, porcs malmenés, poussins écrasés, ou bovins conduits à la mort. Mais peu connaissent sa face cachée, que L.214 prend bien garde de dissimuler.

En effet, la légitime indignation que peuvent susciter les vidéos de l’association ne doit pas occulter la recherche d’explications sur sa croissance rapide et l’origine de ses importants moyens financiers, car la vitesse à laquelle L.214 se développe et la nature de ses campagnes d’action posent questions quant à ses objectifs réels et à la transparence de sa gouvernance.

Les origines de L.214

L.214 est née en 2003 à partir de l’association « Stop Gavage ! » qui avait pour objet « d’interdire la suralimentation des oiseaux utilisés pour produire du foie gras ». Initialement déclarée à la sous-préfecture de Brioude (43), elle s’est ensuite déplacée en Alsace en 2008, afin de se transformer, pour des raisons fiscales, en association loi 1908.

Ce statut spécifique au droit local alsacien-mosellan confère à l’association un droit d’opacité sur ses opérations financières et plus particulièrement sur son financement. Il permet également aux membres du conseil d’administration de récupérer les fonds de l’association lors de sa dissolution, ce qui n’est pas possible avec le statut de la loi de 1901.

Ce choix est sans doute lié, de la part des dirigeants de L.214, à l’accroissement des ressources financières de l’association, qu’ils pourraient s’attribuer en cas de cessation d’activité. L214 est en 2019 une PME de plus de 60 salariés et compte plus de 30 000 adhérents. Elle dément cette opacité et proclame une parfaite transparence justifiant du strict respect des obligations légales et règlementaires.

(…) L.214 a en effet perçu plusieurs financements importants provenant de fondations étrangères et d’entreprises privées qui laissent présumer un rôle dépassant la seule cause de la défense animale. Des associations françaises d’éleveurs qui se sont intéressées au sujet ont observé que certains financements reçus par L.214 présentaient toutes les caractéristiques d’une instrumentalisation de l’association – avec son consentement – à des fins de « guerre économique ».

Un financement partiellement nord-américain

L.214 a bénéficié de financements de deux associations américaines : l’HUMAN LEAGUE (2016) et l’OPEN PHILANTHROPY PROJECT (1 350 000 dollars en 2017). Ces deux fondations américaines financent directement et indirectement des entreprises et des start-ups qui développent des projets de viande artificielle.

De même, selon certaines sources, un producteur australien de viande végétale figurerait parmi les donateurs de l’association. Cette alliance avec des acteurs économiques étrangers traduit un intérêt évident à l’affaiblissement du marché de la viande en France. (…)


Droit de réponse de L214

L’article ci-dessus est extrait d’une contribution initialement publiée sur www.infoguerre.fr Le problème posé par les alliances de L214 | Ecole de Guerre Economique (ege.fr) en date du 1er octobre 2019, lequel avait fait l’objet d’un droit de réponse de l’association L214 sur divers points factuels que nous avons pris soin d’écarter pour éviter toute polémique.

Dans le respect du débat d’idées et attaché au pluralisme des opinions, conformément à la jurisprudence rendue sous le visa de l’article 13 de la loi du 29 juillet  1881, nous sommes amenés à publier la présente tribune en réplique :

L’association L214 entend répondre aux propos contenus dans l’article, intitulé « Les dessous de L214 » publié en janvier 2023 par ACE, Avocats, ensemble. L’association L214, créée en 2008, est une association de défense des animaux, d’intérêt général, qui centre son activité et sa communication sur les animaux utilisés dans la consommation alimentaire (viande, lait, œufs, poisson), en s’intéressant à leurs conditions d’élevage, de transport, de pêche et d’abattage, ainsi qu’aux enjeux environnementaux, sociaux et de santé publique qui y sont attachés. Force de proposition, l’association déploie son expertise auprès du grand public, des professionnels concernés, des politiques et des entreprises pour promouvoir de meilleurs pratiques. L214 est soumise aux dispositions régissant les associations dont le siège est fixé dans les départements de Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin par le Code civil local de 1908. Aucune disposition du régime de 1908 ne « confère un droit d’opacité sur ses opérations financières 107 avenue Victor Hugo – 75116 PARIS Tél : 01.47.27.68.34 – Fax : 01.45.05.39.79 – Mobile : 06.14.66.54.77 Palais A0737 – Lanty@clavocats.fr- www.CarolineLantyAvocat.com et plus particulièrement sur son financement », puisque l’association est soumise à l’ensemble des obligations légales et déclaratives de publication de ses comptes. C’est ainsi qu’elle publie l’ensemble de ses comptes sociaux annuels et le rapport du commissaire aux comptes sur son site internet et sur celui du Journal officiel. Il n’existe aucune zone d’ombre, son financement est parfaitement transparent. L214 fait état, dans ses comptes publiés des dons perçus notamment par l’Open Philanthropy Project, dont elle n’a jamais caché l’existence et qui permet de soutenir son travail concret et efficace d’information et de communication. L214 bénéficie surtout du soutien de plus de 50 000 membres, et les fondations philanthropiques contribuent pour moins de 15% aux dons faits à L214. Si les finances de L214 ont en effet augmenté en 15 ans d’existence, il convient ici de préciser que celles-ci sont sans commune mesure avec celles de l’industrie de la viande, qui profite de ressources bien plus importantes. En outre, l’Open Philanthropy Project finance de nombreux projets dans le monde, en matière sociale, éducative, scientifique, écologique, de protection des animaux et environnementale. L214 n’a, en revanche, jamais été financée par The Humane League et ne reçoit aucun don de la part d’un « donateur de viande végétale australien ». Sur la prétendue « guerre économique » au profit de « la viande artificielle » que mènerait L214 et qui aurait pour objectif « l’affaiblissement du marché de la viande en France », il suffit de noter que la viande cellulaire est aujourd’hui développée par des scientifiques qui pensent que notre appétit planétaire en viande doit passer par de nouvelles techniques, plus soutenables pour la planète, les animaux et les humains. Leurs recherches visent à remplacer la viande industrielle par un autre process, industriel lui aussi, mais coûtant moins de vies, moins de terre, et moins d’eau. Cette viande n’est pas développée pour les vegan qui se passent très bien de viande, mais pour celles et ceux dont la demande en viande est si grande qu’elle approche d’un point de rupture. Pour L214, les solutions existent déjà sans passer par la viande cellulaire. L214 défend les animaux et la conception d’un monde qui les considère comme des cohabitants et non comme des ressources. L’article ainsi publié, mêlé d’erreurs, de raccourcis et d’approximations, formulés de façon affirmative et sans précaution, vise à atteindre la crédibilité de l’association et porte atteinte à son honneur et à sa considération. L’existence de vives polémiques sur la question de la consommation de produits d’origine animale et les conditions d’élevage des animaux, ou sur l’activité même de l’association, ne doit pas conduire à perdre toute prudence et toute mesure dans les propos ainsi diffusés.

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