Interview de Vincent Maurel – associé du cabinet KPMG, co-responsable du département Legal Financial Services, Membre du CNB – Revue ACE n°155

Vincent MAUREL

Associé du cabinet KPMG avocats, Co-responsable du département

Legal Financial Services, Ancien Bâtonnier de l’Ordre des avocats du Barreau des Hauts de Seine (2019/2020), Membre du CNB depuis 2021 (collège ordinal province), Vice-Président province de la CNBF, Membre du Conseil de l’Ordre du Barreau des Hauts de Seine

Propos recueillis par Yann LECLERC

Avocat Counsel

CMS Francis Lefebvre,

Ancien membre du Conseil de l’Ordre du Barreau des Hauts de Seine,

Président ACE Ile-de-France-Ouest

Yann Leclerc : Cher Vincent pourrais-tu nous parler de ton mandat au CNB ?

Vincent Maurel : Je suis membre de trois commissions :

  • La commission Statut Professionnel de l’Avocat (surnommée la commission « SPA », bien que loin d’être un lieu de détente !), présidée par Philippe TOUZET et dont je suis le Vice-Président.

Avec les élus et experts de cette commission, notre mission est double. Nous répondons aux questions des bâtonniers portant sur les structures d’exercice des avocats ou sur les aspects fiscaux et/ou sociaux de notre statut et émettons des avis techniques. Nous travaillons également sur les projets de réforme de la règlementation qui nous gouverne en la matière. Dans ce cadre, nous sommes en lien direct avec les autorités telles la DGFIP ou la DGE. Avec elles, depuis le début de la mandature, nous avons ainsi été amenés à travailler sur des sujets divers comme l’ouverture du capital aux tiers ou le statut social de l’avocat associé de SEL. En ce moment, nous travaillons plus particulièrement sur la réforme des SPFPL et le projet de simplification de la loi du 31 décembre 1990 relative aux structures d’exercice.

  • La commission Affaires Européennes et Internationales, présidée par Jacques TAQUET.

Cette commission est en charge de mettre en œuvre la stratégie et les actions internationales du CNB ainsi que de faire vivre les relations internationales avec nos partenaires étrangers. Dans ce cadre, j’ai notamment délivré à nos confrères du Mali une formation sur les structures d’exercice des avocats, avec une approche comparée entre les

structures auxquelles nous avons accès en droit français et celles accessibles aux avocats dans la zone OHADA.

  • La commission Protection Sociale, présidée par Marie Aimée PEYRON.

Cette commission, qui n’est pas une commission permanente mais une commission ad hoc créée sous la présente mandature, s’intéresse à tout ce qui concerne la protection sociale de l’avocat : prévoyance, retraite, perte de collabo- ration, … Cette commission me plaît particulièrement car l’on y retrouve des thématiques sur lesquelles nous travaillons également au sein de la CNBF.

YL : Je sais que tu es justement très actif au sein de la CNBF, dont tu es un élu depuis 2011. Pourrais-tu nous en dire quelques mots ?

VM : La CNBF est en effet une institution que j’aime beau- coup. Elle est actuellement excellement présidée par notre confrère Christophe PETTITI. J’ai quant à moi l’honneur d’en être l’un des quatre Vice-Présidents province et à ce titre, membre du bureau. J’y croise d’ailleurs Emmanuelle Fena-Lagueny, bien connue au sein de l’ACE et de notre barreau, qui y exerce les fonctions de Secrétaire Générale.

Il y a encore peu, la profession connaissait mal notre caisse de retraite. Grâce ou à cause (je ne sais quoi dire) du projet de réforme des retraites, nos confrères ont beaucoup appris sur elle et sur notre régime de retraite. Et c’est une bonne chose.

Mais la CNBF ne gère pas que nos retraites. Elle a aussi la charge de notre prévoyance. C’est ainsi qu’elle a récemment engagé une importante réforme de la couverture des avocats en cas d’arrêt de travail, d’invalidité et de décès, avec notamment une augmentation de l’indemnité journalière.

Enfin, elle est à l’écoute des confrères en difficulté auxquels, via sa Commission Aide Sociale, elle donne des aides.

Bref, la CNBF est à mes yeux bien plus qu’un « organisme technique » auxquels certains parfois ont la tentation de la cantonner. Sa gouvernance est composée d’avocats élus,

particulièrement dévoués au service de leurs Confrères. Le tout dans la discrétion la plus totale. L’humilité et l’humanité, principes qui nous sont chers, n’y sont pas que de vains mots.

YL : Vincent tu es avocat associé chez KPMG avocats, implanté dans le Barreau des Hauts de Seine ; peux-tu nous parler de ce Barreau ? Quand l’as-tu rejoint ?

VM : J’ai rejoint le barreau des Hauts de Seine dès 1999, année de ma prestation de serment. Depuis, je n’ai jamais cessé de participer à la vie de notre Barreau.

J’y ai d’abord été élu Secrétaire de la Conférence, la même année, avant de devenir Président de l’association des Secrétaires et anciens Secrétaire de la Conférence.

J’ai également été membre de la troupe de la Revue de l’UJA pendant de très nombreuses années (de 2000 à 2017 tout de même !).

Puis, parce que l’on ne peut pas faire que jouer la comédie et chanter, j’ai été élu membre du Conseil de l’Ordre en 2011. A mes débuts au sein de celui-ci, j’ai d’abord été en charge de la formation. J’ai ainsi représenté l’Ordre à l’HEDAC. D’ailleurs, c’était passionnant : avec ma double casquette d’élu de la CNBF et de membre du Conseil d’Administration de l’HEDAC, j’avais une vision de la profession assez large, allant de la formation initiale de nos futurs confrères au départ à la retraite des plus anciens d’entre nous !

Ces différentes expériences m’ont beaucoup apporté et m’ont presque naturellement conduit à briguer le mandat de Bâtonnier.

J’ai été Bâtonnier durant deux année difficiles (2019 et 2020), que nous ne sommes pas prêts d’oublier: j’ai débuté mon mandat avec la grève contre la réforme de la justice (PJL), puis à la CNDA et enfin… contre la réforme des retraites ! Cette dernière ayant été brusquement interrompue par la pandémie liée à la COVID 19 !

Toutefois, malgré toutes ces difficultés et situations de crise, je ne garde que de bons souvenirs de mon bâtonnat.

J’ai eu la chance d’être épaulé par un Conseil de l’Ordre tout à fait exceptionnel et par un personnel de l’Ordre très dévoué. Grâce à eux, j’ai pu conserver la tête froide. Et ensemble, nous avons pu préserver l’unité de notre Barreau dans la tempête et aider ceux qui en souffraient le plus !

Je garde le souvenir d’une mobilisation sans faille d’avocats issus de tous horizons, de toutes structures, pour participer qui à des actions de défense de nos valeurs et de notre profession, qui à des actions de solidarité.

YL : Vincent peux-tu nous parler du particularisme du Barreau des Hauts de Seine ?

VM : Le Barreau des Hauts de Seine est réputé être le premier Barreau d’affaire car plus des deux tiers de ses membres exercent leur activité au sein de « grandes structures » orientées conseil et contentieux en droit des affaires. Historiquement, c’est dans ce Barreau que s’est concrétisée avec éclat la fusion des professions en 1992, en intégrant un très grand nombre de conseils juridiques. Il a alors acquis une singularité dans le paysage des barreaux français, qu’il cultive depuis trente ans. Les cabinets qui le composent attirent ainsi toujours plus de jeunes Confrères.

Cette singularité donne une couleur particulière à notre Barreau, qui adopte une approche très pragmatique des sujets qui concernent notre profession. Loin de tout dogme. Ce Barreau est passionnant à gérer au quotidien. Il y existe une composante dite « traditionnelle » très forte, avec plus de 700 avocats qui exercent leur activité en individuel ou au sein de structures de très petite taille et une compo- sante de près de 1 800 avocats, qui exercent au sein de structures de très grandes taille, appartenant ou non à un réseau. Tout l’enjeu et de faire en sorte que ces deux composantes, qui peuvent parfois avoir une vision différente de la profession, de ses enjeux, dialoguent, échangent afin que tous restent unis et avancent ensemble, de façon consensuelle.

YL : A présent peut-on aborder le volet syndical ? Nous avons appris que le cabinet KPMG avocats a décidé cette année de rejoindre l’ACE. Peux-tu nous en dire plus ?

VM : Cette adhésion résulte d’un constat partagé par les élus de notre cabinet au sein du Conseil de l’Ordre et ses dirigeants : notre profession fait face à de très importantes mutations, évolue dans un monde terriblement compliqué, toujours plus compétitif, … Et dans lequel « on » ne veut pas que du bien aux avocats. Surtout aux avocats d’affaire, aux fiscalistes. Nous l’avons vu encore très récemment avec la réforme du Code de procédure pénale et les exceptions apportées au secret professionnel.

Dans ce contexte, les différentes organisations syndicales de notre profession d’avocat ont une vision et des positions parfois très, voire radicalement différentes.

Il nous est apparu important que notre cabinet, qui est une jeune pousse puisqu’il a été créé il y a moins de trois ans, participe aux débats qui animent la profession et à ses combats.

Pour ce faire, quoi de mieux que d’adhérer à un syndicat qui porte des idées dans lesquelles nous nous retrou- vons ?

YL : Quelles sont les qualités que tu retrouves à l’ACE et chez ses représentants ?

VM : Sans porter bien entendu de jugement sur les élus des autres syndicats, je ne peux que constater que les « acéistes » que je côtoie sont des bosseurs !

C’est déjà une qualité essentielle à mes yeux.

Ils ont des idées, des convictions, mais pour autant, ils restent à l’écoute des autres. Ils acceptent la discussion et les points de vue divergents.

Ils veulent comprendre leurs interlocuteurs, sans dogmatisme.

Je n’apprécie pas les idées préconçues et l’absence de tolérance dans les échanges. Au contraire, j’aime la confrontation des idées et des arguments.

L’ACE a une vision très constructive, s’inscrit dans la prospective.

C’est un syndicat qui n’a pas peur de l’avenir et qui au contraire, aborde les enjeux de la profession avec pragmatisme, loin de tout conservatisme.

Cher Vincent je te remercie d’avoir accepté de répondre à mes questions avec franchise.

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