Adhérer au SE ACE ! – Revue ACE n°155

Par Guy MARTINET, Président du SE ACE

Qu’est-ce que le SE ACE ?

Tous les membres de l’ACE savent naturellement ce qu’est le SE ACE…

Même s’il est vrai que la question soit encore parfois posée – a d’ailleurs été posée sur le stand que tenait le SE ACE au congrès de Marseille – : le SE ACE, c’est quoi ? A quoi ça sert ? Ce sigle est celui du Syndicat Employeur de l’ACE.

Il n’est évidemment nul besoin de rappeler ce qu’est l’ACE, son origine, sa création (il y aura trente ans l’année prochaine), son parcours.

Pour autant quelques précisions ne sont peut-être pas inutiles, pour bien comprendre la répartition des enjeux entre l’ACE et le SE ACE.

L’ACE est une association, qui développe ses diverses activités et assume sa vocation syndicale dans le périmètre professionnel. C’est au sein des institutions professionnelles, au premier rang desquelles les ordres, le CNB, la CNBF, que l’ACE agit pour la promotion et la défense des avocats, du métier qu’ils exercent et des cabinets qu’ils exploitent tels des entrepreneurs.

Le SE ACE, quant à lui, est un syndicat, dont la création remonte à 1974 et qui a été constitué en application des dispositions du code du travail. Le SE ACE est une organisation patronale, qui a pour objet d’assurer la défense des intérêts des avocats dont les cabinets occupent du personnel salarié ou des avocats salariés qu’ils gèrent tels des employeurs.

Quel est le rôle du SE ACE ?

Il résulte de ce qui précède que son domaine d’intervention est celui du dialogue social et du paritarisme.

En réalité, l’expérience démontre que ces matières sont mal connues, y compris des avocats travaillistes eux-mêmes.

Pour deux raisons :

  • L’activité des avocats spécialisés en droit du travail est le plus souvent principalement centrée sur la vie des entreprises. La réglementation sociale qu’ils pratiquent est celle qui touche aux seules relations entre les employeurs et leurs salariés
  • le contrat de travail, sa conclusion, son exécution, sa rupture, ainsi qu’aux relations avec les représentants de ces derniers. De même, les négociations collectives qui appellent leur conseil ou leur intervention sont celles qui se déroulent à l’intérieur des entreprises et des groupes d’entreprises ou dans le cadre interentreprises.
  • Or la réglementation sociale comprend un deuxième volet, qui couvre le dialogue entre les partenaires sociaux que sont, d’une part, les organisations syndicales de salariés (OS), d’autre part, les organisations professionnelles d’employeurs (ou organisations patronales – OP –) représentatives au niveau national (multi-professionnel ou interprofessionnel) ou au niveau des branches professionnelles.

Le dialogue social s’exprime ainsi au travers de la négociation des conventions et accords collectifs ou de leurs avenants, qui régissent les rapports entre l’ensemble des entreprises et des salariés sur le plan national ou au sein des branches.

Il se concrétise en outre par la présence paritaire des organisations syndicales et patronales dans l’enceinte des organes de gouvernance des différentes institutions que les- dites branches ont mises en place, notamment, en matière de formation, de protection sociale et de prévoyance.

Le champ de l’activité de conseil qui s’étend ainsi devant les cabinets des avocats spécialisés en droit du travail est donc beaucoup plus vaste qu’on ne le pense généralement.

Il inclut tout d’abord, cela va de soi, l’accompagnement de la clientèle des organisations syndicales ou patronales de toutes branches dès lors que celles-ci ont besoin d’être assistées par un conseil ou défendues quand il y a lieu.

Il englobe également, et c’est là que l’on retrouve le SE ACE, l’action syndicale proprement dite au sein de la branche qui nous concerne, celle des avocats.

Quelles sont les missions du SE ACE ?

Avant de poursuivre, un mot sur la notion de branche.

Les branches regroupent les métiers qui correspondent au secteur de l’activité économique relevant de leur champ d’application respectif (la branche des avocats par exemple).

Elles étaient en surnombre : plus de neuf cents étaient recensées en 2015, beaucoup ne témoignant pas d’une réelle vitalité. Le souci de renforcer le dialogue social a donc induit un processus de restructuration et de fusion des branches, qui a été engagé par la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale afin de ramener leur nombre à un peu moins de deux cents.

Selon le code du travail, les branches professionnelles ont pour mission :

  • de définir par la négociation les conditions d’emploi et de travail des salariés employés par les entreprises relevant de leur champ d’application ainsi que les garanties qui leur sont applicables dans les matières pour lesquelles le code du travail prévoit soit que la convention ou l’accord collectif de branche ont la primauté sur les accords d’entreprise (au premier rang desquelles les salaires minima hiérarchiques et les classifications) soit que la convention ou l’accord collectif de branche peuvent stipuler qu’ils ont la primauté,
  • de réguler la concurrence entre les entreprises relevant de son champ d’application.

C’est précisément de cette action syndicale que le SE ACE a concrètement la charge, au niveau des deux champs de la branche des avocats que constituent le personnel salarié des cabinets d’avocat – IDCC 1000 – et les avocats salariés – IDCC 1850 – (IDCC pour « identifiant de convention collective »).

Il l’assume en tant qu’organisation patronale, dans l’intérêt des avocats et cabinets d’avocats employeurs de la branche, et tout d’abord des avocats et cabinets d’avocats adhérents Comment le SE ACE exerce-t-il cette action ? Illustrons le pro- pos par quelques exemples :

  • Le SE ACE négocie avec les partenaires sociaux (les autres OP et les OS) les conventions et accords collectifs ainsi que leurs avenants au cœur de cette institution centrale du dia- logue social qu’est la CPPNI (Commission paritaire permanente de négociation et d’interprétation), mise en place par l’article 24 II de la loi Travail n° 2016-1088 du 8 août 2016 dans chaque branche – article L. 2232-9 du code du travail – afin de remplacer et d’uniformiser toutes les diverses entités dédiées au dialogue social qui préexistaient).
  • Il engage les actions que peuvent exiger les procédures d’extension des accords collectifs et avenants à l’ensemble des cabinets de la branche, en recourant aux moyens que lui confère le code du travail :
    • opposition (pour autant que les conditions de majorité soient réunies – article L. 2261-19 du code du travail –) ;
    • saisine du groupe d’experts (institué par l’ordonnance Macron n° 2017-1388 du 22 septembre 2017 afin que puis- sent être évalués les effets économiques et sociaux susceptibles de résulter de l’extension du texte concerné – articles L. 2261-27-1 du code du travail –, voir sur ce sujet le n° 154 de la revue).
  • Au même titre que les autres acteurs de la branche, il est l’interlocuteur de la Direction générale du travail (DGT) et participe aux échanges qui concourent à la structuration de la profession.
  • Il participe aux commissions qui peuvent être créées par la CPPNI parmi ses membres pour traiter de sujets particuliers ; par exemple la commission chargée de la fusion des conventions collectives des deux branches susmentionnées – cette commission ayant été constituée à la suite de la décision actée par accord du 26 juillet 2019 de fusionner les deux champs de la branche des avocats –.
  • Il délègue ses membres pour occuper des mandats dans les organismes paritaires (entre autres la caisse de prévoyance et de retraite supplémentaire Kerialis – anciennement Crepa –, ou encore la Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation professionnelle de branche et du personnel non-avocat – CPNEFP –).

Il participe aux activités de l’Unapl au travers de l’adhésion de l’ACE à cette union nationale qui, comme l’on sait, fédère un grand nombre d’organisations syndicales de professions libérales et qui est elle-même membre de l’U2P, première organisation patronale représentative au niveau national.

Le SE ACE est-il représentatif au sein de la branche des avocats ?

Assurément si l’on considère que le SE ACE est fort des adhé- rents de l’ACE…

En pratique, les choses sont, ou plutôt sont devenues, plus complexes.

L’état du droit
  • Ainsi que cela a été mentionné plus haut, pour qu’une organisation (syndicale de salariés ou professionnelle d’employeurs) puisse être considérée (et reconnue) comme un acteur du dialogue social, il est nécessaire qu’elle soit représentative.

Or cette notion de représentativité est désormais d’autant plus prégnante que les organisations sont aujourd’hui confrontées à la nécessité de justifier de leur représentativité.

C’était le cas pour les organisations syndicales depuis la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale.

C’est devenu le cas pour les organisations patronales depuis la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale précitée (complétée par ses décrets d’application), dont larticle 29 a introduit dans la Deuxième partie du code du travail (Les relations collectives du travail), un nouveau Titre V sous le Livre premier (Les syndicats professionnels) consacré pour la première fois à la représentativité patronale (articles L. 2151-1 et s. du code du travail).

La mise en œuvre de ces textes a ainsi eu pour effet de bouleverser le paysage syndical, en réservant dorénavant une place aux seules OS et OP aptes, au-delà de la légitimité dont elles estiment pouvoir se prévaloir, à satisfaire de manière cumulative à un ensemble de critères : c’est au vu de ces critères que leur représentativité effective est maintenant déterminée. S’agissant des organisations patronales, ces critères (repris par symétrie avec les critères applicables aux organisations syndicales de salariés) sont au nombre de six (articles L. 2151- 1 et L. 2152-1 du code du travail) :

  • le respect des valeurs républicaines,
  • l’indépendance,
  • la transparence financière,
    • l’ancienneté (laquelle doit être au minimum de deux ans),
    • l’influence (prioritairement caractérisée par l’activité et l’expérience),
    • et enfin le sixième critère de l’audience (évaluée en comptabilisant soit le pourcentage des entreprises – i.e. les avocats et cabinets d’avocats – adhérentes par rapport à l’en- semble des entreprises adhérant à une organisation patronale dans la branche soit le pourcentage des salariés employés par ces mêmes entreprises, le seuil étant fixé à 8 %).
  • Si la représentativité a donc pris la forme d’un sésame, la clef de voute de ce nouvel édifice est constituée par la mesure de cette représentativité, tâche qui a été confiée à la Direction générale du travail (DGT) et qui se traduit par la promulgation d’un arrêté de représentativité (un pour les OS et un autre pour les OP).

Cette mesure s’effectue par cycles de quatre ans, la première ayant eu lieu en 2016 (sans aboutir dans la branche des avocats en raison de spécificités propres à celle-ci et qui ont émergé lors de l’instruction des dossiers de candidature à la représentativité établis par les OP), la deuxième ayant été reportée à 2021 en raison de la crise sanitaire, la prochaine devant inter- venir en 2025.

Elle repose sur les dossiers de candidature déposés par cha- cune des OP, dûment contrôlés par leur commissaire aux comptes.

L’état de la situation
  • Les résultats de la mesure opérée en 2021 ont été présentés le 7 juillet 2021 au Haut conseil du dialogue social. L’arrêté de représentativité est en principe attendu en janvier 2022.

Ils ont toutefois révélé que le SE ACE ne remplissait pas la condition du critère de l’audience, liée au nombre des adhérents (il convient, pour être complet, de souligner que les données d’appréciation prises en compte sont celles qui devaient être relevées au 31 décembre 2019). Or ce critère est mis en œuvre dans le cadre de la mesure de la représentativité d’une manière qui le rend déterminant et en pratique éliminatoire.

De sorte qu’il existe désormais un risque réel que la représentativité du SE ACE ne soit pas reconnue à l’issue du cycle de mesure qui est en cours et sur le point d’arriver à son terme. Aussi et pour tenter de maintenir la place du SE ACE, celui- ci s’est immédiatement rapproché de deux autres organisations patronales confrontées au même écueil et partageant des orientations syndicales similaires, dans l’objectif de réaliser entre les trois OP une Union syndicale et d’atteindre ensemble le seuil susmentionné en cumulant leurs scores d’audience respectifs.

Le projet a séduit et les statuts de cette Union syndicale ont été rédigés au cours de l’été 2021. Cependant il n’a finale- ment pas vu le jour (sans qu’il soit nécessaire ici de narrer les péripéties qui ont entouré cette initiative).

Au moment où le présent article est rédigé, l’avenir est donc suspendu à la promulgation de l’arrêté de représentativité des OP de la branche des avocats.

  • Il demeure que ces nouvelles règles et l’application qui est en faite débouche sur une situation pour le moins paradoxale puisqu’elle aboutit à exclure du dialogue social des OP, dont le SE ACE, qui sont des acteurs engagés, qui se sont investies de longue date dans les institutions paritaires mises en place par la branche des avocats, et alors que leur implication de même que leur ancienneté leur donnent naturellement vocation à poursuivre leur mission sur le fondement des cinq premiers critères.

Aussi, une réflexion parait sans nul doute indispensable pour faire progresser les textes dans un sens qui, sans remettre en cause la légitimité républicaine du critère arithmétique de l’audience, concoure à éviter de fausser le jeu du dialogue social.

A tout le moins une chose est certaine : le SE ACE continuera à pouvoir participer aux travaux de la commission investie de la fusion des champs et des conventions collectives, ce qui lui permettra de faire entendre comme auparavant sa voix ainsi que de représenter les intérêts et valeurs de ses adhérents (qui sont pour l’essentiel ceux de l’ACE) sur les sujets cruciaux qui constituent le fondement des relations sociales dans la branche.

Le SE ACE est en tout cas résolu à s’attacher avec la plus grande détermination à rester en lice et à se donner les moyens de faire valider son dossier de candidature en 2025 afin d’obtenir la reconnaissance de sa représentativité, celle-ci étant pour l’essentiel subordonnée, on l’aura compris, au nombre de ses adhérents (ou de leurs salariés).

C’est pourquoi le SE ACE a besoin, plus que jamais, et particulièrement pendant les prochaines années, que ses adhérents soient nombreux :

Adhérents de l’ACE mobilisez-vous dans l’intérêt de vos cabinets !

Adhérez avec la même conviction au SE ACE !

Plus d’articles